« La vocation c’est avoir pour métier sa passion » a affirmé Stendhal. Cette définition a cela de bon qu’elle n’est pas restrictive (au seul « ministère à plein temps »), mais aussi qu’elle lit la vocation à la fois avec une réalité concrète, un métier, et une réalité plus intérieure, la passion. Ainsi, si la vocation dans la Bible est d’abord l’appel de Dieu adressé à tous les croyants pour suivre le Christ, une seconde réalité vient se greffer sur le même modèle : les vocations particulières (pasteur, missionnaire, etc.). Ces vocations sont à la fois une réalité concrète (du temps y est consacré) et une réalité intérieure, une véritable passion. Nous voulons ici mettre en lumière la manière dont ces vocations spécifiques de missionnaires peuvent être suscitées. Bien entendu, d’après le début de Luc 10, on pourra répondre : Pourquoi se fatiguer à chercher la manière car le moyen est donné ici clairement : la prière ! ». Pas faux. Mais doit-on s’arrêter là ? Si la prière est décrite ici comme le fondement indispensable, la première action de foi de tout chrétien cherchant à susciter davantage de vocations missionnaires, on ne peut se résoudre à se dédouaner en réduisant tout effort à ce seul moyen. Dans sa grâce, Dieu utilise de multiples procédés pour nous mettre en mouvement, pour nous envoyer en mission. Ainsi, tout en étant conscient du rôle de la souveraineté divine dans la distribution des divers ministères (Eph.4.7-16), on cherchera à mettre à jour les divers ressorts (théologiques, sociologiques, psychologiques, pratiques, historiques, etc.) qui peuvent entrer en jeu dans l’apparition d’une vocation missionnaire. Si Dieu demeure la cause première, celui qui appelle et suscite la vocation missionnaire, cela n’empêche pas de pouvoir discerner les causes secondes, que Dieu utilise dans sa souveraineté, pour susciter des vocations missionnaires.
Plusieurs auteurs se sont intéressés aux vocations, que ce soit sous l’angle de leur développement individuel ou encore de notre besoin collectif. Force est de constater pourtant que lorsque l’on arrive à tenter de considérer leur genèse, les informations obtenues se font aussi précises qu’un manuel d’embryologie du 17ème siècle. Dès que l’on parle de la manière dont susciter une vocation, on en arrive assez rapidement à des considérations purement pragmatiques basées sur l’expérience sans faire recours à un examen plus minutieux des moyens mis en cause. On en arrive souvent alors à se retrouver face un inventaire à la Prévert, certes utile, mais un peu déroutant : la lecture de la bible, une discussion, un congrès missionnaire, la lecture d’une biographie, l’accès à des informations précises sur un champ de mission particulier, etc. De nombreux ouvrages ou articles se concentrent sur le leadership, la formation de responsables, sans se concentrer sur ce qui peut faire naître une vocation.
Voilà donc ce qui nous a poussé à formuler notre problématique de la sorte : Comment susciter davantage de vocations missionnaires en Europe francophone aujourd’hui ?
Pour répondre à cette problématique nous avons circonscrit le sujet dans une introduction qui reprend chacun des mots clefs de la question et tentent ainsi de définir entre autres notre compréhension de la vocation missionnaire mais aussi le choix du mot “susciter”. Ensuite nous avons proposé une analyse biblique se concentrant sur quelques exemples de vocations missionnaires et sur la manière dont elles ont pu à la fois être suscitées et en susciter d’autres à leur tour. Ce qui nous a donc intéressé est « la chaîne » des vocations missionnaires dans le Nouveau Testament (Barnabas, Marc, Paul, Silas, Timothée, Luc, Priscille et Aquilas, Apollos…). Nos conclusions de cette analyse biblique ont mis en lumière plusieurs facteurs essentiels qui ont permis, dans les débuts de l’Eglise, de voir l’expansion de la mission et davantage de missionnaires suscités. Voici les 14 points relevés :
Notre seconde partie se compose de l’analyse de deux sondages que nous avons effectué auprès de 175 missionnaires et de 334 jeunes évangéliques (15-35 ans). L’analyse des résultats a alors permis de dessiner les contours d’un idéal type que l’on pourrait définir ainsi :
Notre étude tend donc finalement à affiner notre hypothèse de départ en faisant du désir mimétique (l’exemple d’un missionnaire pour susciter d’autres missionnaires) plutôt un déclencheur important (si le missionnaire a une démarche proactive) au sein d’un contexte ecclésial propice, ouvert sur l’extérieur, et surtout dans la continuité de la base indispensable qu’est la compréhension profonde de l’Evangile et des ses implications pour la mission.
La conclusion vient enfin poser quelques jalons pratiques en cherchant à apporter des pistes de réflexion sur des questions telles que, par exemple : À qui d’établir une base assez solide pour que chacun puisse entendre et comprendre l’Evangile et la place de la Mission dans le plan du salut ? Comment mettre en place un contexte ecclésial propice au discernement des futures vocations missionnaires ? Quel lieu adéquat peut être établi pour permettre le contact avec des déclencheurs qui invitent à la mission ? Ainsi que ce soit pour la base, le contexte ou les déclencheurs nous posons les questions du « Qui ? », « Comment ? » et « Pourquoi ? » afin de cerner les enjeux pratiques et d’orienter vers la mise en place d’un modèle pragmatique. Alors, comment susciter davantage de vocations missionnaires aujourd’hui en Europe francophone ? Cette étude ouvre un nouvel horizon en tentant de proposer la piste suivante : il semble qu’il faille susciter un mouvement de multiplication de vocations missionnaires, chaînon manquant entre les mouvements de multiplication de disciples et les mouvements de multiplication d’Églises. Et ce mouvement doit jaillir d’une mobilisation massive de toute l’Église et des divers dons que le Christ lui a fait (Eph.4.8ss).
Damien Wary, pasteur implanteur à Corneilles.
Extrait de son mémoire de fin d’études de Master en implantation d’Églises
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